Strabisme et rééducation orthoptique 

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Dans l’esprit du grand public, la rééducation orthoptique est quasi systématiquement associée à d’autres mesures dans la prise en charge conservative du strabisme. Cette idée reçue est fausse et plus encore, dans certains cas, l’orthoptie utilisée à mauvais escient peut avoir des répercussions graves. Elle peut notamment déboucher sur l’installation d’une diplopie (vision double) chez les patients atteints de strabisme convergent.

Ainsi, en termes de strabisme, il existe uniquement deux situations pour lesquelles l’orthoptie peut faire partie du traitement médical mis en place : le strabisme divergent (si la déviation est modérée) et l’insuffisance de convergence. 

Orthoptie : définition 

L'orthoptie est une spécialité paramédicale exercée par des professionnels de santé. Elle consiste en la réadaptation de la fonction visuelle ainsi que le dépistage de ses troubles, quel que soit l’âge des patients, du nourrisson au senior.

Les orthoptistes travaillent en étroite collaboration avec les ophtalmologistes, sur prescription de ces derniers. Outre celles mentionnées plus haut, leurs missions sont diverses. Elles incluent notamment la détermination de la puissance des verres correcteurs, la mesure de la tension oculaire, l’exploration du champ visuel, le suivi de certaines pathologies, comme le glaucome, ou encore la prise des photos du fond de l'œil. De plus, depuis quelques années, les orthoptistes sont autorisés à renouveler les ordonnances de lunettes et de lentilles.

Néanmoins, les orthoptistes sont surtout connus du grand public comme les « kinésithérapeutes de l’œil », puisque ce sont eux qui sont en charge de sa rééducation dans certains cas de déséquilibre oculaire, de baisse de la vision ou encore de troubles neuro-visuels.

Cette forme de traitement est basée sur la pratique d’exercices et de jeux visuels qui ont pour objectif d’améliorer la coordination et le fonctionnement des muscles oculo-moteurs, afin de favoriser une meilleure « fusion » des images perçues par les deux yeux.

Si l’orthoptie trouve de nombreuses indications, il convient néanmoins de corriger une idée reçue : les cas de strabisme dans lesquels elle est indiquée sont rares et, prescrite de manière inappropriée, elle peut même avoir des répercussions graves, par exemple l’installation d’une diplopie dans les cas de strabisme convergent.

Ainsi, la prise en charge d’un strabisme par rééducation orthoptique doit strictement se limiter aux patients atteints d’exotropie (avec déviation de moins de 20 degrés) ou ceux souffrant d’insuffisance de convergence.
 

Rééducation orthoptique et insuffisance de convergence 

Selon la Société Française d'Ophtalmologie (SFO), « la convergence se définit par une direction des axes visuels telle qu’ils se rencontrent en un certain point ». Dit plus simplement, il est question de convergence lorsqu’un individu cherche à fixer un point qui se rapproche graduellement de son visage, en déviant spontanément l’axe visuel de chacun des deux yeux œil vers l’intérieur, pour permettre une meilleure fusion des deux images. Ce phénomène est constamment mis en jeu au quotidien, par exemple lors du travail sur écran d’ordinateur ou de la lecture rapprochée. Mais aussi pour la vision de loin, on considère qu’il y a un tonus convergent de repos (les yeux étant orientés en divergence dans leur orbite).

L'insuffisance de convergence (IDC) correspond à une amplitude de fusion réduite en convergence. Elle entraîne un effort excessif, parfois même une impossibilité à maintenir le bon alignement des yeux sur les objets rapprochés. On estime que ce trouble touche de 0,1% à 0,2% de la population générale, les sujets adultes étant les plus fréquemment atteints.

C’est souvent l'hétérophorie, strabisme latent constaté lorsque les yeux sont au repos physiologique, qui est à l’origine de l’insuffisance de convergence. Les troubles de l’accommodation-convergence ou la prise de psychotropes sont aussi des étiologies fréquentes.

Il existe cependant d’autres causes potentielles : écart inter pupillaire important, paralysie d’un ou plusieurs muscles oculomoteurs, traumatisme crânien, retard de développement, amétropie forte ou mal corrigée, amblyopie unilatérale, troubles thyroïdiens ou ORL, ainsi que certaines maladies comme celle de Parkinson ou la sclérose en plaques.   

Prise en charge orthoptique de l’insuffisance de convergence

Le diagnostic se fait sur la base des symptômes observés, des antécédents du patient, de l’étude de la correction optique existante et des activités pratiquées (écrans, travail de précision etc.). Le bilan orthoptique inclut aussi un certain nombre de mesures, dont celle de l’acuité visuelle, de la réfraction, de la déviation latente et du pouvoir de fusion.
 
Si une IDC est confirmée, la rééducation orthoptique n’est pas systématique. Elle serait en effet inutile ou certainement peu efficace si l’insuffisance est due à une amétropie mal / non corrigée, à une maladie ou un traumatisme crânien, que le patient est âgé de plus de 80 ans ou qu’il a déjà suivi, de manière infructueuse, plusieurs rééducations orthoptiques d’IDC.

Quand l’utilité d’une prise en charge orthoptique est avérée, il existe différentes méthodes et le schéma rééducatif doit être adapté à chaque patient en lui proposant les exercices appropriés.

L’utilisation de technologies récentes pour en élargir la palette fait aujourd’hui débat au sein de la profession. Pour certains, l’usage de nouveaux instruments (tablettes tactiles, casques de réalité virtuelle…) autorise plus de variété et donc un maintien de la motivation du patient, qui peut par ailleurs intensifier sa propre rééducation à domicile. A l’inverse, pour d’autres, l’utilisation excessive d’écrans est trop souvent la cause de dysfonctionnements visuels et les inclure dans une thérapie orthoptique est donc un non-sens.

Quoi qu’il en soit, il convient d’insister sur le taux de réussite de la prise en charge de l’IDC via des procédés orthoptiques. D’après la SFO (2013), ils permettent de faire disparaître les signes de l’insuffisance de convergence dans 70 à 80% des cas, évitant ainsi une éventuelle intervention chirurgicale sur les muscles oculo-moteurs.             

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